dimanche 19 janvier 2025

Pour débattre de 2024 (3/3)

 

Pour débattre de 2024 (3/3)

Sans doute notre lectorat, plus nombreux en 2024 que n’importe quelle autre année post-Covid, apprécie-t-il les formats plus resserrés que nous adoptons désormais. Les longues chroniques se font rares, ce qui n’empêche pas les articles fleuves puisque nous aimons trier, classer et forcément débattre, ce qui fait par exemple de nos bilans mensuels de belles opportunités de découvertes. Je saute sur l’occasion pour partager avec vous un bilan tout personnel de cette année musicale. Il y aura forcément de l’underground mais aussi, et c’est ma petite particularité dans l’équipe, (un peu) de mainstream (tout relatif, ne vous attendez pas à voir Billie Eilish pour autant) et même de l’autopromotion (à dose homéopathique, une mention par partie). Ce qui nous fera donc trois volets contenant chacun 8 albums (pour faire 24 en 2024), une autopromotion et un bonus.




8. The Cure - Songs of a Lost World

"Je n’ai jamais été contemporain d’un album réussi de The Cure. Je m’attendais donc à un énième ratage et l’introduction Alone m’a hérissé les poils. Certes, les synthés sont un brin sirupeux et l’ensemble nostalgique à souhait. Mais la nostalgie ne pourrait-elle pas être, parfois, un ressenti digne d’intérêt ?
Et si la production a été critiquée par certains puristes, tout me semble vraiment à sa place sur cet album. Principale réussite, la voix de Robert Smith semble ne pas avoir bougé d’un iota depuis trois décennies si bien que je n’ai lu aucune des nombreuses critiques évoquer ce point alors qu’à peu près tous les autres aspects ont été ici ou là pointés du doigt. Mais surtout, les compositions sont solides et envoûtantes, avec Alone, donc, puis And Nothing Is Forever et son délicat piano. Mais c’est surtout la deuxième partie du disque qui emporte la mise, avec une ambiance en permanence sur le fil entre rage contenue, énergie du désespoir et nostalgie mélancolique, que ce soit sur Drone:NodroneAll I Ever Am et surtout le sommet Endsong qui n’aurait pas fait pâle figure sur un Disintegration dont ce disque constitue le petit frère tardif".

Lire l’avis complet et l’avis opposé des copains dans le bilan de novembre.




7. Ocean Teeth - Many People You Meet Tomorrow Will One Day Drown In The Sea

Petite confidence : Ocean Teeth c’est un petit peu mon super-groupe underground ultime. C’est un duo composé des deux artistes qui, sans faire injure aux dizaines d’autres dont j’admire le parcours, me surprennent à chaque sortie tout en conservant ce que l’on appelle "une patte" aisément reconnaissable. Bref, Eddie Palmer et Arnaud Chatelard, dont (au moins) l’une des productions en solo s’invite également dans ce top, ce sont pour moi les papes de ce que j’appelle, maladroitement et faute de mieux, le milieu underground le plus inventif qui soit. Alors, pensez bien, les voir collaborer ensemble pour la première fois, ça m’a excité et, évidemment, je n’ai pas été déçu.
On retrouve des synthés qui auraient leur place chez Innocent But Guilty et des basses caractéristiques du son de Cloudwarmer mais on sent surtout que les deux artistes ont travaillé dans un grand respect réciproque et c’est bien là l’une des grandes qualités de cet album. En effet, aucun d’eux ne cherche à tirer la couverture à lui, c’est aussi ambitieux que frais et aéré, tirant aussi volontiers vers Air (Escape From Yesterday) que sur un trip-hop cinématographique plus menaçant. Un disque dont je n’avais pas mesuré tout le potentiel à la première écoute : bien que charmé - j’avais l’impression que ce grand respect empêchait les deux apôtres de se lâcher totalement - et que j’ai largement réévalué ces derniers mois. Je crois que l’on n’est finalement pas loin du chef-d’œuvre et j’attends de pied ferme la suite de leurs aventures communes.




6. Monolake - Studio

"L’IDM de Monolake retrouve une seconde jeunesse avec ce Studio tout sauf désincarné qui mêle synthés stellaires et rythmiques déstructurées à un travail de sape permanent qui évite à l’ensemble de ronronner. Entendons par là que l’Allemand ne se contente pas de répéter et décliner la même mélodie à l’infini mais, même quand il trouve un thème efficace, lui ajoute des effets et lignes de synthés supplémentaires pour emmener l’auditeur dans une nouvelle direction. Un titre tel que Stasis Field est, comme d’autres, un joli modèle de périple électronique non linéaire à l’intensité sans cesse renouvelée. Pas loin des chefs-d’oeuvre des mètres-étalons du genre il y a trente ans".

Lire l’avis des copains dans le top de septembre.




5. Cloudwarmer - Nostalgia For A Future That Never Happened

Comme souvent, Eddie Palmer occupe une place importante dans le classement de mes albums préférés de l’année. Déjà représenté avec Lunologist puis en duo avec Innocent But Guilty sous l’alias Ocean Teeth, l’Américain produit avec Cloudwarmer - son projet le plus enthousiasmant - un nouveau bijou, peut-être plus long en bouche qu’à l’accoutumée mais ô combien réjouissant. Entre trip-hop, lofi beats et downtempo, l’artiste joue avec les étiquettes aussi bien qu’avec les samples. Le jeu de basse, les rythmiques et les interludes à base de spoken word qui sont, de longue date, le ciment de l’esthétique musicale de Cloudwarmer sont toujours aussi délicieux et les nappes se font ici, comme le titre de l’album l’indique, peut-être un peu plus nostalgiques qu’à l’accoutumée. L’inspiration est au rendez-vous, et Eddie Palmer a vraiment pris le temps de peaufiner ce disque qui, une fois n’est pas coutume, suit de plus d’un an son prédécesseur (sous l’alias Cloudwarmer uniquement, entendons-nous). Toujours transcendant, Nostalgia For A Future That Never Happened lorgne parfois vers une musique cinématographique à l’instar du sommet We Got a Ghost in the Neighborhood que l’on imaginerait tout à fait dans une bande originale de Trent Reznor et Atticus Ross. Brillant.




4. Cigarettes After Sex - X’s

"Sur X’s, on trouve toujours ce son vaporeux et mélancolique mais quelques nuances apparaissent. Certains regretteront une basse plus en retrait - à l’exception du très minimaliste Hideaway et, on y reviendra, du titre final - mais l’ajout de synthétiseurs analogiques apporte une véritable profondeur. Mais surtout, c’est le chant de Greg Gonzalez qui évolue, ce dernier s’autorisant des backs envoûtantes et bienvenues sur le sommet Baby Blue Movie.
Grower en puissance, X’s surclasse son prédécesseur grâce à quelques titres au-dessus de la mêlée tels que - on les connaissait déjà - Tejano Blue et Dark Vacay, mais surtout l’étrangement énergique Holding You, Holding Me, un Silver Sable au refrain renversant et, atout majeur de ce disque, sa conclusion Ambien Slide sur lequel la basse ronde enlace de manière audacieuse la batterie avant que la voix ne vienne transformer l’essai et en décupler la majesté."

Lire la chronique complète ici.




3. DIIV - Frog In Boiling Water

Il aura fallu un concert à L’Antipode en fin d’année pour définitivement transformer l’essai. Frog In Boiling Water m’avait déjà sévèrement accroché l’oreille, avec ce shoegaze rappelant tantôt Slowdive (Soul-Net en tête), tantôt une version plus accessible de My Bloody Valentine. Mais la performance hors-norme des quatre musiciens ce jour-là, avec ce fil conducteur incluant des petites scénettes façon Dharma Initiative (ceux qui ont vu la série "Lost" comprendront) lors des transitions, une énergie au-dessus de la moyenne pour un groupe de shoegaze et les sous-titres des paroles en bas des visuels pour favoriser la compréhension de ceux qui, comme moi, comprennent mieux l’anglais à l’écrit qu’à l’oral, m’ont convaincu d’une chose : les compositions de ce disque sont bien plus que solides ! Très client de Is The Is Are, j’avais été moins convaincu par Deceiver, et je classe ce nouvel opus (inspiré par cette théorie qui veut que la grenouille plongée dans l’eau bouillante s’enfuit, tandis que celle dont l’environnement se réchauffe doucement cuit à petit feu... analogie qui, plus que jamais, devrait nous faire réfléchir collectivement...) tout en haut de leur discographie... et j’irai même plus loin, parmi - déjà - les classiques d’un genre qui en manque depuis quelques décennies.




2. Blockhead - Mortality Is Lit !

"Par où commencer ? Déjà, ce disque comporte très peu de temps faibles (Earth’s Farewell Tour, en deuxième position, est sans doute l’un des morceaux les moins passionnants, malgré son crescendo d’intensité final). Mais surtout, Blockhead semble totalement libéré, alternant entre samples survitaminés, basses lourdes, cut-up vocaux décomplexés (Orgy At The Port Authority réunit ces deux derniers aspects pour un résultat addictif), drums percutants, mais également synthés plus mélancolique et instruments à vent dopant parfois l’ensemble.
Difficile de détacher quelques morceaux de ce disque qui multiplie les idées et contrepieds sans jamais être déplaisant, mais Dolphin Lundgren est un tube incontournable évoquant effectivement le meilleur de The Go ! Team, tandis qu’un morceau comme Burning Man In Tehran convoque, lui, le premier album de The Avalanches. Arrêtons-nous ici pour ne pas procéder à un avis track-by-track qui ne conviendrait pas à l’exercice de l’avis express mais l’on ne peut que vous encourager à écouter cette pépite si vous aimez l’abstract hip-hop, RJD2DJ Shadow et tout ce qui y ressemble de près ou de loin".

Lire l’avis complet et celui des copains dans le bilan de novembre.




1. Fontaines D.C. - Romance

"Grian Chatten expliquait récemment que ce disque ouvrait un nouveau chapitre et que les Fontaines D.C. en avaient marre d’être cantonnés à l’image de cinq types avec des guitares. Entre spoken word, arrangements de cordes, mélodies plus pop et même quelques effets que l’on pourrait rapprocher du shoegaze, les Irlandais calment le jeu sans aseptiser leur propos, loin s’en faut. Ce disque est loin d’être parfait (je ne me suis pas attardé sur sa pochette au charme tout relatif) mais, contrairement aux deux premiers, il est profondément humain et ressemble à tout sauf à la commande d’une major, n’en déplaise aux grincheux qui vont tourner le dos au quintette lorsque sa fanbase va (encore) s’élargir. Rien de plus logique, finalement, pour un groupe qui vient d’enchainer un très bel album et un autre encore plus grand en l’espace d’à peine plus de vingt-quatre mois. J’aime cet album de rock s’appuyant sur une vraie voix, et qui va m’accompagner ces prochains mois, sans doute même plus, et tant pis si je dois pour cela être couvert de goudron et de plumes".

Lire la chronique complète ici.




Bonus


Un chouette EP : Lia Pikus - Ritual EP

Très chouette découverte que cet EP prometteur. Mon compère Rabbit a déjà eu l’occasion d’en parler et évoquait très justement un rapprochement avec les univers de Hope SandovalJulee Cruise et Andrew Bird. Effectivement, la sensibilité de la violoncelliste new-yorkaise évoque ces illustres artistes auxquels j’ajouterais également Agnès Obel et Emily Jane White. Si vous recherchez du songwriting léché et une voix d’ange, Lia Pikus devrait répondre à vos attentes.




Autopromotion : Valgidrà - Warplush Vol. 3 Remixes

Quelques mois après la publication de Warplush Vol. 3, j’ai proposé à quelques compères de revisiter l’un des titres de ce disque. Et les retours ont largement dépassé mes attentes, que ce soit au niveau de la quantité ou de la qualité. Impossible de nommer tous les artistes qui m’ont fait l’honneur de participer à cette compilation, mais je vous invite à écouter le rendu, cela va de l’ambient à l’IDM, en passant par le trip-hop ou l’electronica. Délicieuse impression que celle de perdre le contrôle de ces créations. Merci à tous les camarades de cette aventure, que ce soient des copains de longue date ou des rencontres plus récentes qui ne demandent qu’à être prolongées.



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